Caractéristiques générales du manioc

Le manioc (Manihot esculenta) est un arbuste vivace de la famille des Euphorbiaceae, originaire d’Amérique du Sud. Cultivé comme plante annuelle sous les climats tropicaux et subtropicaux, ses racines tubéreuses riches en amidon et ses feuilles sont consommées. Certaines variétés contiennent des glycosides cyanogéniques toxiques, neutralisés par la cuisson pour les rendre comestibles.

Importance économique et alimentaire mondiale

  • Production mondiale : Passée de 175,8 millions de tonnes (2000) à 302,7 millions de tonnes (2020) selon la FAO (2023).
  • Impact socio-économique : Nourrit quotidiennement plus de 800 millions de personnes, dont 500 millions en Afrique. Pilier alimentaire et économique pour les pays en développement.
  • Transformation : Environ 70 % de la production est traitée par des micro-industries, notamment en Afrique subsaharienne, pour des usages alimentaires (farine, gari) et industriels (amidon, biocarburants).

Le manioc au Sénégal : Contexte historique et répartition géographique

  • Historique : Culture antérieure à l’indépendance (1960). Représente 25 % des légumes consommés (Aïchatou, 2006).
  • Zones de production : Concentrée à Thiès (78,2 %), Kaolack (7,2 %), Kolda (3,6 %), Fatick (3,4 %), etc. (Ministère de l’Agriculture, 2008/2009).
  • Variétés locales : « Soya », « Combo » et autres, mais avec des rendements limités à 11 tonnes/hectare.

Dynamiques récentes et objectifs stratégiques

  • Production actuelle : Estimée entre 600 000 et 650 000 tonnes (2021/2022), avec un objectif d’1 million de tonnes annuelles (PPAAO), d’ici 2030.
  • Innovations variétales : Introduction de variétés haut rendement via des collaborations régionales (ex. Ghana) : « Ampong », « Broni », « Sika » (25-30 t/ha en pluvial, 40-50 t/ha en irrigation).
  • Transformation alimentaire : Potentiel de 235 000 tonnes de farine annuelles. L’incorporation de 10 % de farine de manioc dans le pain réduirait les importations de blé.

Organisation de la filière manioc du Sénégal 

L’analyse de la chaine de valeur du manioc au Sénégal montre clairement que les activités des différents maillons de la filière (producteurs, transformateurs, distributeurs ou commerçants) ne sont pas suffisamment coordonnées entre elles.

Au niveau des zones de production, des regroupements existent sous forme de collèges dans le but de bénéficier de l’appui financier des pouvoirs publics ou de bailleurs de fonds. Il y a donc nécessité de pouvoir regrouper les divers intervenants au sein d’un cadre interprofessionnel d’envergure nationale pour assurer un développement durable de cette spéculation.

Libéralisation et régulation post-désengagement de l’État

Depuis la libéralisation des filières agricoles dans les années 1990 et la création en 2002 de l’Agence de Régulation des Marchés (ARM), une structure rattachée au ministère en charge du commerce qui reprend l’ensemble des missions de régulation des marchés (Gergely et Baris, 2009), l’ARM a remplacé les structures étatiques comme la SAED pour réguler le marché sans intervention directe. Pour le manioc, cela se traduit par un suivi des prix et des stocks, plutôt que par un contrôle administratif, favorisant ainsi un marché compétitif tout en limitant les distorsions.

 

Défis persistants

Malgré les avancées, les variétés locales à faible rendement freinent les ambitions économiques. Leur utilisation limite la concrétisation complète des projets de substitution du blé et d’expansion industrielle.